Rappel :
Devant la gare, près de la réception que donne une sous-préfète vitrifiée par l’importance du vernissage, Ydit donne son récit.
Parmi les auditeurs, distraitement Germaine : n’écoute goutte.
Elle essaie de comprendre les mouvements contradictoires de passagers hâtifs mais sans doute en faute? Ydit persévère dans ses « Omissions », orateur actif et peut-être sans faute?
Ailleurs, on peut estimer que la Russe sans gêne et sans accent attend son tour de parole sur les véritables histoires du père. Ainsi, au retour du tour, s’il revient des terres d’OubliEs,
enfin Ydit connaîtrait les plages que le sable imagine entre les trous de la mémoire.
La marée de vivre se retirant à petits coups de langue gourmande alors dévoilera l’état des savoirs sur le rôle du père dans l’histoire, ses rôles dans la construction des secrets, comme on trouve des couteaux dans les flaques dessinées
par le courant éteint entre les yeux impunis des jeunes filles.
Trop tôt.
Ydit :« C’était dans une région humide aux belles terres grasses ». Puis, voyant les sourcils levés de son auditoire ( fragile et passager, d’ailleurs le chien du SDF est parti à la poursuite du gamin), il corrige : « C’était dans une chaude région aux sols rouges ». Il raconte ensuite qu’il était là, depuis peu d’années, à faire son emploi.
Son métier, c’était surtout de parler en public et de compter en secret. Conduire un département qu’on lui avait, dans son domaine, imprudemment confié…Terre de bolides F1 et de chars à bœufs. Cette année là – mais c’est ainsi depuis deux ou trois mille ans- il y avait moins d’argent à dépenser pour bâtir, et plus d’obligation à tenir avec le moins d’argent de plus.
Moins de bras pour autant d’oeuvre. Moins de blé pour autant de moules. Moins de crédits, de kopecs, de Russes troubles avec les roubles, de pianos-bar et de soirées entre amis. Ydit, parfois, s’interrogeait comme chacun : qu’est on allé faire dans cette isba ? Mais ce sont de beaux souvenirs, qu’on n’OUBLIeS donc pas ici.
D’un certain point de vue, avec un humour de poilu en 17 , on pourrait dire que ça anticipait la série des « Omissions » : on joue avec le retrait, le « un peu moins », le recul mesuré. Bien sûr l’argument ne pesait pas, mais il attirait des foules dehors. :
YDIT : » Ce n’était pas l’ovation glorieuse de retours, ni les gesticulations de fin d’étape. Représentation régulière, soirs de première tous les après-midi, grand gala pour petite starlette gauchette comme une gaufrette qu’on déchiffre pour lire l’avenir dans les plis de la peau sucrée. Et les abonnés qui attendent ( avec sono) qu’on parle à la fenêtre. Gros succès de mé-sestime, c’est le travail.
Quelques amis aussi pour préserver des contacts involontaires
Ne pas se vouloir aimé : condition de l’exercice. Moins d’argent : on se débrouille, mais non pas sans dégâts. Pas de viande, peu de soupe. »
YDIT : « L’Excellence Grenelle-Paris-Chef de l’époque avait prévu un passage, pour le lendemain, arrivée par le train du peuple à la gare TGV. A la gare : dispositif de musculeux policiers, le préfet (un vrai, au format réglementaire, uniforme un peu vieilli, dorures, moulures, cheminée, espace sous plafond) . A la descente les gars des RG, et même une capitaine, entourent l’excellence comme si la Mongolie entière l’attendait à cheval sur la voie 2, direction Angers.
Filmiquement époustouflés de s’inscrire dans l’écran de leur propre réel, les gardes engouffrent l’Excellence dans la berline protégée. Elle n’a pas vu les mains qu’on lui tend, à part celle bien sûr du préfet. Ydit raconte qu’il la remet dans sa poche. »
Puis le trajet à 150 en convoi avec deux motards locaux pas si sûrs de leur vitesse, vers une sous préfecture, par la départementale défoncée. Programme du jour : l’inauguration express, l’invisible serrement de mains cette fois prises une à une,
discours défoncé mal écrit par un assistant déchiré de reproches. Surtout la presse locale. « Il s’agit d’apporter un aimable soutien résolument partisan à un candidat local en posture …enfin, encore plus démuni que le gamin aux oubliEs, même pas de cache-sexe sur son incompétence. S’il lui restait, dans la circonscription, un bulletin de vote pour se préserver de l’échec, c’était le sien.. Ce sont des choses qui se font, quand on est Son Excellence de Paris, préserver en vitesse sa majorité.
Convoi sous la bruine : police en tête, puis préfet ayant pris la ministre en passagère bla bla car , puis on ne sait plus quel sénateur -maire et ses assistantes (pétulantes péronnelles pétaradant du langage ). » Puis, à la traîne, le directeur du département, Ydit, banquette arrière, conducteur devant ( ce qui est tout de même plus pratique). Et derrière : la police.
Ydit raconte que « son chauffeur d’alors n’était pas très sûr de lui sur la route humide
…La sueur lui faisait par avance une auréole. Bon, mourir en service, c’est enrichissant pour la famille. »
« Soudain, téléphone (en ces temps, un gros cigare fixé dans la voiture, antenne au toit). C’est le préfet soi-même. Sa hautesse en ENA-dress. Dans son grand costume. Son ton de baron d’Empire qui soupire et rêve d’écrire comme Maupassant en parlant comme Noiret. Il dit à Ydit qu’on va faire un arrêt. Tant mieux, pense Ydit, ça rend possible de survivre encore une minute. »
Les voitures du convoi stoppent comme elles peuvent sur les bas côtés boueux près d’une station locale. Cinématographique.
« Pas très formel, pas très sécurité, coin de bord de route, mais c’est LA ministre, on va pas détailler les détails des délits. Tous ces gens, pense Ydit, qui inventent des plans de coupe juste pour donner à voir qu’ils savent des faire des films. »
Téléphone, de nouveau, toujours gros cigare, le préfet : « ELLE veut que vous veniez vers nous, ma voiture. « Il pleuviote ( ici, c’est banal), Ydit fait le brave, tête nue ( il n’a d’ailleurs pas de parapluie). « Les gros bras de la police ne sont pas sortis. Le préfet oui, qui est dehors, maintenant, et qui tente de s’abriter sous sa casquette vaillamment vernie. D’un geste mi-las, mi-royal, il désigne la portière restée toute fermée. 

« J’entre ? » raconte que demande Ydit, qu’un petit rien de proximité tête-à-tête avec sa ministre restée dans l’auto n’excite pas tant. Encore, si c’était le bureau ministériel et elle qui l’attendrait à la fenêtre ?
Mais là, en particulier, non, merci. C’est comme de vouloir faire une bise à un tank. Mais l’auto t’attend, toto. Et c’est tendance gelé gelé. Ydit hésite, main sur la poignée. »
« Bah oui, entrez », mouvement d’épaule, répond le préfet « On va pas y passer l’hiver ». Vraiment, ces jeunes directeurs de service de l’Etat, c’est définitivement pas des futés. Cinq minutes tout très seul avec la ministre sur une banquette arrière abandonnée par le préfet ( ENA 1971, promotion Elzevier), ça se refuse pas, pourtant. Sont des blancs-becs. Seront jamais préfet. Bien fait.
Alors Ydit entre.
A suivre par la Séquence Publique d’OubliEs 54, qu’on a pris l’usage de nommer : l’effacé de la fessée.
Didier Jouault pour Yditblog
Juste une remarque : on ne reconnaît pas la ministre de fesse Mais enfin…
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Ouuiii le fesse à face est à éviter dans tous les cas
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