YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 38/99, Chapitre 12 – fin de Erika, son histoire, tout ça. Y a de quoi plonger.

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Le soir, verre de virgin Spritz en mains (elle se méfie un peu depuis le coup des photos à 4000 euros pièce, tout de même, le machin finit par trouver ses limites) ERIKA fait à son tour un récit pour NATHAN, qui vient de rentrer de la Chartreuse (une marquise en visite, elle, est cette fois sortie à cinq heures).

 

Il y a beaucoup de vieilles marquises vers Mantoue, on dirait un film de Comencini. Mais si quelqu’un ne ressemble pas du tout à une vieille marquise dans un film, c’est bien notre ERIKA.

L’Anglais avait un peu bu, Erika aussi, mais ce n’est pas une raison pour admettre un certain regard, et elle s’était donc vaguement fâchée, pas trop toutefois, car la scène virait au comique. D’ailleurs, John avait gracieusement présenté des excuses mineures et rieuses, prétextant le triple feu de la canicule, le Prosecco, la séduction d’Erika. Ainsi donc, puisque les choses en avaient été là, racontait Erika tandis que Nathan mettait le couvert, elle avait profité du trouble et joué son va-tout (rêvant du Vanouatou plus que de va nu pied), sans y croire : acheter les quatre ?? Cher John, pourquoi pas, si vous y tenez, mais alors vous devez bien admettre que cela forme du coup série, presque une collection même, et donc je vous abandonne avec plaisir mes quatre à quatre mille, mais pour vingt mille, et j’y perds sans doute. C’est ça, le sens de l’art industriel.
Traduction un peu compliquée, surtout à cette heure, et John avait payé 20000 sans marchander, l’Anglais sans peine. Bonne affaire. Il, toutefois, avait exigé avec beaucoup de gentillesse- qu’on décrochât de suite l’accrochage, ce qui fut l’occasion de jolis mouvements de dos, pour ne pas dire autrement, car cet Anglais ( nommé John) tient à l’hypocrisie du langage, mais lorsque notre Erika dut se mettre sur les pointes pour libérer les photos, il n’y eut pas du regard que pour les cadres.

Passons la scène même si, obscène à coup sûr pour accepter la transaction, obscène John probablement s’imagine qu’Erika porte un string noir en dentelle, et de Calais en plus. De Calais ! On croît mentir, inventer, mais non, c’est juste qu’on rapporte.

Ce qu’Erika souhaiterait, c’est raconter l’encore plus étonnante scène de restitution des clés Airbnb, un café en terrasse, place aux herbes, avec ce vieux Français qui est resté parfaitement à sa place, rassure toi, mais qui s’est donné beaucoup de mal, vraiment beaucoup, une nuit de gogo de Google ( en Italien, ça se dit autrement, on adapte ), pour découvrir ce qu’il a nommé : «  l’Histoire d’Erika ». Oui, Caro, mon histoire de moi-même, ton Erika, tu penses ! Elle en donne quelques passages, de mémoire, retirant ses chaussures à talons heureusement plats qu’elle avait conservées à tort, il fait trop chaud et ce n’est pas hygiénique, les Scandinaves vivent en chaussettes, eux, c’est mieux, et d’accord, je n’ai pas de chaussettes en été, ce n’est pas une raison, mes pieds sont plus propres que ton sol, et tu saurais dire ça en Anglais sans peine ?

   

La pittoresque et supposée « Histoire d’Erika » formera, désormais, l’une de leurs anecdotes préférées pour les soirées d’amis où ceux de la plate Mantoue racontent leurs visiteurs AirBnb. Si on ajoute le coup des photos à quatre mille, ça occupe parfait entre poire et grappa. Le Français a été incroyablement incompétent, même pour un vieux Français, ou bien est-ce le moteur de recherche ?
Il a confondu, c’est visible, avec ma cousine de Milan, tu ne la connais pas, il faudrait qu’on passe la voir un de ces jours, mais Milan, pas en été, non, et comme c’est chiant l’hiver, on verra, donc ma cousine, Erika RICCI, peut-être a-t-il même saupoudré avec des éléments de sa famille à Civitavecchia, on a eu de la famille là-bas, je crois, un consul ou un truc de ce genre, non ? En tout cas me voici maintenant avec deux vies, deux histoires.

Erika, c’est la chaleur de la plate Mantoue, s’est mise à l’aise entièrement, Nathan cacherait son trouble s’il se savait regardé regardant. Mais il n’y a que vous qui regardez, c’est déjà bien assez.sous l'oeil de Nathan 1 cope
Ils peinent tous les deux à éviter le fou-rire, le repas se termine, Nathan se sert un Lagavulin bien tassé pour fêter ça, deux Erika d’un coup, la voici double, ça ne le gêne pas on dirait ? Nathan pourrait penser, l’onservant ainsi qui traverse  maintenant l’appartement et lui débarrassant la table (c’est leur accord, il met, elle démet), qu’elle a en double de quoi lui procurer déjà une authentique agacerie visuelle, mais ce type de réflexion, définitivement, abaisserait le narratif plus bas que les yeux dans les yeux auquel il aspire au nom de la vérité, comme du pur amour conjugal. Pour Maman Nathan, c’est comme ça, l’amour conjugal, les yeux dans les yeux, t’occupe pas du reste, ça viendra tout seul, non mais.

En plus, ( on dit  » de surcroît » quand on est bien élevé ! ), dans cette longue et troublée HISTOIRE d’ERIKA, celui qui se tient le plus mal, comme toujours, c’est LE NARRATIF, autrement dit le NARRATEUR SPÉCULATIF !

Le narratif, c’est comme les puces de lit, on ne les voit pas, mais on bouge, elles bougent, progressent sournoises et ombreuses, on dort,  » la vie dans les plis »- bonjour Riri- on ne sait ni ne sent rien, et -hop! – jusqu’à ce que ça pique, enfle, rougisse, et alors tout le monde le voit, le narratif, gros comme un nez sous le masque.

Reste toutefois, du coup, et on l’aura noté avec regret, que plus personne n’a pu aborder le sujet de cette promenade vers le jardin ou vers le secret de Giorgio Bassani.

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Didier Jouault pour YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 38/99, Chapitre 12 – fin de d’Erika, son histoire, tout ça. Y a de quoi plonger. Suite, évidemment chapitre 13, pas de chance, fin octobre, l’assaut des Ottomans paraît faire vacille l’occident, ça va saigner.Prenez des vitamines. Et de la patience.

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YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 37/99, Chapitre 12 – milieu. Histoire d’Erika, encore. La modernité affranchie de provocations.

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Le reste, l’essentiel, les œuvres plastiques excluant avec vigueur cette ‘vulgarité’ de la vidéo, volontiers minimalistes, forment- il faut bien l’avouer–une collection intelligente et fine et sensible, mélange qui ne va plus de soi depuis l’effondrement du Primat de la Représentation en peinture.
De plus, avec la bienveillante faiblesse de papa –qui considère un peu tout cela comme une anticipation d’héritage-Erika réceptionne la collection jadis invendable lors de la bulle internet. Et, devinez quoi, parmi les peintres, certaines cotes ont gravi le Tibet, serré la paluche du Yéti, revendu Tchang contre son poids en or noir. Des croûtes, qu’on donne au brocanteur du rez-de-chaussée, avec sept ou huit œuvres à présent très convoitées- et coûteuses- permettent de harponner l’amateur, si heureux ( et content de lui) d’avoir découvert un Toti Sialoja de la première période, oui dans ce bazar de brocante au pied de chez l’Erika, oui oui, dans sa galerie de la rue Girogio tu te rends compte, Charles-Edouard, daté de 1998 mon vieux, tu as vu les couleurs, incroyable, et un peu cher, d’accord, mais franchement il va encore monter, appelle Marie-Sophie pour qu’elle voie, et puis c’est sur son compte à elle. Je vous emmène dîner ?

Erika, toujours, est séduisante, mais avant tout (soyons respectueux), elle sait réellement de quoi elle parle, connaît ses peintres sur le bout des doigts, au fond du cœur, a de plus complété son expérience US par des Cours très pointus au Venise Institut d’Art Contemporain, ce truc fondé par la Peggy, pas loin de l’Accademia, et qu’elle visitait en promenant ses cadords, au bord du Grand Canal.
Les meilleurs acheteurs- les plus réguliers – peuvent être invités au second, qui est l’appartement privé du couple, bien que le nombre réduit des œuvres, et leur extrême qualité, transforment cet espace intime en une suite discrète et comme expatriée de la galerie. Seule la chambre n’est pas ouverte à la visite, bien que de très intéressants travaux d’Annette Farge et de Sophie Calle- mais ils le sont toujours -y apportent sinon de la fraîcheur (les deux artistes ne sont plus de la première jeunesse…) au moins une vivifiante ironie française bien propice à l’épanouissement habile des ébats.
En ce temps, dit-elle, davantage qu’aujourd’hui peut-être, les artistes français témoignent d’un goût pour la modernité affranchie de provocations jugées puériles à quoi s’abandonnent encore trop, selon Erika, les « faiseurs » d’Italie. Les Italiens, on les dirait sortis d’un concert de Nina Hagen, faut quand même pas charrier : on n’a pas besoin de vomir pour peindre, on n’est plus chez Boris Vian, et c’est terriblement dépassé, son Ecume.

Le succès, on l’a compris, est rapide. Les amateurs sont vite acheteurs, les œuvres passent, les marges s’épaississent très au-delà de ce que tout galeriste prétend : bien manger à sa faim pour que les artistes mangent un peu à la leur. Louable projet.
Comment ne pas espérer que le monde va mûrir vers une embellie permanente, galeries d’art et fric, bourse et bitcoin, DarkNet et petites gourmandises.
Le dernier geste pour l’assurance succès, sans doute est-ce le soir où, ayant tout de même un peu bu, Erika sort du petit bahut finlandais quatre photographies 21×27, encadrées de bois magenta, cyan, cobalt, noir, déjà porteurs de tout ce qui convient en matière de traces légères, petites rayures complices du temps, essoufflement de brillance comme après la course créative. Bref, de l’authentique garanti, et qui a vécu ce que vivent les gloses. En noir et blanc tiré à gros grain, les images (des vues de Mantoue en hiver, solitude et craintes du vent) ont été repeintes à la main, avec de la gouache toute simple, comme on a fait sur les carte postales des années cinquante.

Erika hésite, mais pas longtemps. Elle n’est en effet plus tout à fait maîtresse de ses propres inhibitions, un spritz un Talisker. Elle fixe les cadres, en cinq minutes, sur le palier entre les marches et l’appartement, et leur choisit une valeur marchande au sein de l’ineffable série bien connue, saison 75, « pied-de-nez-au-touriste ». On pourra toujours, avec les amateurs véritables, si besoin, plaider le troisième degré, au deuxième étage, en première intention.

Avant mon train pour Ferrare, et j’ai pris le plus matinal pour gagner une journée, l’échange de clés avec Erika autour d’un dernier café a eu lieu rapidement, on n’est pas chez Béroul, l’échange des « drueries » entre Tristan et Iseult, ça dure, ça dure. Je ne lui parle pas des photos-montages laissées ( à quel dessein, du dessin?) dans l’épais livre d’art, dernier tiroir. Dès que je l’ai quittée, j’en éprouve le regret, presque le remords : il faudrait toujours savoir non pas l’intention de l’opérateur – facile à repérer – mais l’intention/attention du modèle. Si l’on se montre c’est pourquoi ?

Retour au Airbnb, sur le livre d’or, Erika pourra lire : « Ecoute, Erika, le café n’est pas assez fort ce matin pour que je puisse poser entre pain et confiture quelques-unes de ces phrases en Téflon, par lesquelles des romans sont connus d’un lecteur et peuvent également servir de grille-pain ou de vide-poches. »
C’est assez obscur, mais ça correspond bien à l’image du vieux Français, et puis ce genre de trucs on oublie avant même d’avoir fini la phrase.

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Didier Jouault pour YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 37/99, Chapitre 12 – milieu. Histoire d’Erika, encore. La modernité affarnchie de provocations. A finir (l’épisode, non mais ! ) : 26 octobre. Sauf si. Mais il n’y a pas de  » sauf si ».

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YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 36/99, Chapitre 12 – L’affaire des photos à 4000 -début .

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Chapitre 12

L’Affaire des photos à 4000

Le DVD qui voisinera ensuite, curieusement, avec le précédent montrant l’enlèvement de l’enfant, sur l’étagère de la villa toscane, mais c’est carrément le foutoir dans mes DVD, qu’est-ce que tu as fichu, Erika, on sait plus où on en est, tu pourrais pas respecter l’ordre alpha, c’est pas dur, t’as fait du grec ancien, non ? tu peux pas ranger ici « Zero Dark Thirty », entre » Alice dans les villes » et « Alphaville« , tu te rends compte ?!

L’auteur est Katlyn BIGELOW, patronyme très anglo-saxon cette fois. Plus tard, Erika, ayant interrompu le film sur la séquestration et l’assassinat du gamin au bout de quatorze minutes, voudra le regarder, un soir, « Zero Dark Thirty ». Ensuite- mais cela est déjà connu- elle deviendra une sorte d’addicte, hallucinée ou nerveuse, comme si on ne connaissait ni la fin ( annoncée par un président US) ni les tours et détours de cette déroute du droit international. Elle pourrait de mémoire citer ce long combat d’une femme seule opposée à des hommes méfiants, au sein de l’Agence ( la vraie).


Elle pourrait plaindre leur absence totale de clairvoyance, malgré les rayons verts

 

Ou encore, rappeler que le directeur de l’Agence ( la vraie) du reste assez « Parrain », finit par y croire parce qu’elle a l’air d’un ange fâché.

Tant pis, même le chef commando hésite, puis on y va, et les minutes de grande violence guerrière (elle qui n’aime que la douceur et l’art et le vin, on ne comprend décidément pas), Erika les attend, les retrouve, avec une sauvage et silencieuse béatitude.

Peut-être en raison de cette belle scène muette du triomphe secret ? Ouf !

 

Mais toutes ces histoires, ça commence à faire beaucoup.

A vingt-trois ans, Erika décide donc de partir aux US, quitte à être soi-même dans les histoires plus partagées. Elle y évite avec soin les peut-être encore pouilleux, bien que très éloignés, cousins de Littel Italy, à l’époque nettement moins gentrifiée. Musées, road-trips vécus ainsi que des road-movies observés de l’intérieur depuis la décapotable climatisée à jantes brillantés de chez Chrysler, villes de l’est, plages de l’ouest, déserts du centre et de partout. Randonnées à Goblin Valley – on y trouve le garde-parc très joliment bâti. Jours de rieuses dévalescences neigeuses dans le Montana, et le moniteur ne manque pas d’attraits, bien qu’un peu odorant type équin, mais on s’amuse pour les images.

Elle va quitter Washington quand elle dîne avec des amis récents au « Café des Artistes » Foggy Botton, une véritable caverne, très hospitalière, assez versée dans les salades chères et légères, juste moins chères que chez « Acqua al 2 ». Amateur et marchand d’art, il y a un type jovial, en réalité une sorte de sous-traitant de Thomas Agnew and Sons, juste avant qu’il soit acheté par Ant Hovy Crielton Stuart. Ce type espérait vendre à de riches commerçants de l’Ohio, soucieux de placements durables, les meilleurs des peintres minimalistes ou conceptuels européens, Italiens, peut-être même de Mantoue : Enico Bay, et ses premières œuvres de toute fin années Quatre-vingt, ou encore mieux : Antoni Realcalai, Elio Waschimps, Toti Sialoja, plutôt période 95-2000, si vous voyez ce qu’on veut dire. Et quand on parle peinture, même conceptuelle (donc peut-être privée de peinture), y a intérêt à voir de quoi on parle.
Erika se souvient de bavardages de papa, naguère, elle semble presque professionnelle, tant la culture vient en aimant. Son charme de jeune femme italienne de très bonne famille (encore des mots qui vont faire des vagues), dont elle prend conscience comme d’un outil de travail, donne à ses traductions une saveur de soir printanier sur la Lombardie (car Mantoue n’est pas en Emilie-Romagne, on ne peut pas mettre tous ses lieux dans le même terrier, tous ses dieux dans le même crassier, ainsi de suite : ses yeux dans le même plumier).
Affaire conclue, dans des conditions telles qu’on peut sans réticence commander une autre bouteille de Bollinger, ce qui ne veut pas rien dire dans un restaurant de Washington, de plus en Euros, avec le change à 1,42. Tu le sens passer, le champ, davantage que le vieux Henri la Toulouse au bar du French Cancan.
Français, d’origine italienne, encore un, Nathan aspire à retrouver les arômes délicats de la péninsule. Erika sentait, aux US, venir une forme d’ennui. Quinze jours et quelques nuits plus tard (sur lesquelles google respecte la règle des hypocrisies), la décision est prise.


Ils auraient pu choisir Bologne ou Milan, même l’ombre de Ferrare, j’avoue que ça m’aurait arrangé, ça m’aurait fait gagner une étape, mais tant pis, je ne suis pas si pressé, puis Mantoue, ça vaut son reflet, et donc non, les voilà qui s‘installent à Mantoue, terre d’origine, dans le vénérable immeuble de deux étages qu’habitait la tante Irèna, prématurément mais opportunément décédée – on ne se refait pas quand on a décidé d’être gentille, c’est une marque de famille. Tumeur cérébrale de la tante. « Et cérébrale, elle l’avait toujours été », murmure allègrement Erika, dont la joie est à la dimension de l’occasion. Bonne fille, bon cœur, bon esprit, mais avec modération.


Au rez-de chaussée, dont un sexagénaire brocanteur un peu louche est locataire pour encore trois ans, la partie gauche de la vitrine sera désormais consacrée à la mise en valeur de deux œuvres, trois au maximum, pourvu que l’une soit une sculpture. Au premier, déjà, les deux prévoient ce qui sera de plus en plus à la mode : faire en sorte que le client se sente chez lui, principe totalement inconnu du petit commerce pour qui l’acheteur doit comprendre qu’il est chez l’autre, et qu’il est venu pour sortir la carte Gold.

On suppose que Stéfania de Modène ignore même l’existence de ces coffres où les œuvres sont serrées comme des anchois ou des sardines sardes.

Erika et Nathan déposent contre les murs du très vaste et lumineux appartement de somptueux secrétaires à design nordique, des fauteuils club sentant (on le croirait) le pur Glen (Talisker, Nathan adore) et le faux lord grisonnant, modèle pas cher payé pour la photo de catalogue. Ils travaillent la malice au point de laisser, sur les tables et les chaises, apparaître ici une bouteille ouverte et des verres (tout de même pas The Talisker, un petit Aberlour 8 ans va suffire) ailleurs une boite de bons chocolats bruns hauts de gamme, genre Cyrile Lignac, et même (jouxtant le catalogue énervé lui-même de ses prix à hauteur de contre-ut) des scones faits main par Grand’Mam Nathan et le miel du jardin (en fait, on achète chez Marina, au marché, Plazza Broletto, mais c’est du bon).


Le reste, l’essentiel, les œuvres plastiques excluant avec vigueur cette ‘vulgarité’ de la vidéo, volontiers minimalistes, forment- il faut bien l’avouer–une collection intelligente et fine et sensible, mélange qui ne va plus de soi depuis l’effondrement du Primat de la Représentation en peinture.

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YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 35/99, Chapitre 11 – Il fallait que ce fut très violent ou désopilant -fin. Faut voir, l’attaque.

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Rien de plus, on se demande où va la nuit, cette nuit, et – si on s’emmerde – on sort fumer. Rien que des Camel sans filtre.  Ou on reste à la plage en lisant l’Histoire au rythme d’une marée en Méditerranée ?img_2461

Seul, peut-être, l’orage Wikileaks, en plein milieu d’été, l’atteignit un peu, c’est ce qu’elle écrivait dans un SMS adressé à papa. Car, de plus en plus, Erika disait son amour (de loin) pour les Etats-Unis. On manque évidemment de témoignages fiables sur ce qu’un tel projet, intime, à peine formulé, provoque chez le susdit papa, lequel pendant ces années a poussé vers une forme de sagesse, durablement assise sur l’afflux régulier des commandes.

Enfin, c’est le discours de Barak OBAMA, le 2 mai 2011, qui donne au désir ancien la force d’une explosion nouvelle. Sans aucun rapport avec le fait que, cette semaine-là, Erika fait également la connaissance de ce que peut représenter le plaisir pour une femme, – délicate coïncidence qu’elle gardera secrète-, dans les heures qui suivent on peut voir sur les écrans des IPhone, IPad, ITruc, le président US qui, depuis la salle de crise dans le sous-sol de White House, examine instant par instant, avec inquiétude puis bonheur, les progressions des deux hélicoptères puis des hommes à terre, vision infra rouge, transmission pas terrible mais suffisante.

Pas la peine d’y voir trop clair quand on voit rouge.

Plus tard, pour des raisons assez difficiles à comprendre ( surtout qu’Erika n’aime pas en parler), elle visionnera plusieurs fois le film qui sera produit à partir du livre tiré lui-même des événements, tirés de …Admiration de ce spectacle guerrier – long- dont l’héroïne est une femme seule et obstinée, contre des mâles impératifs et impérieux, telle que le cinéma US aime à en filmer ? La poursuite de Ben Laden, qu’elle mène à partir d’indices menus comme ses cheveux et contre l’avis général, finit  par une nuit violente, tout le monde ayant fini- après des années- par être convaincu. Étonnant, quand on y pense, car cette obstination, cette fermeté, Erika n’a jamais eu besoin d’en faire preuve. Justement?

Ce sont vingt-trois (tout de même ) Navy Seals mis au service de la SAD ( la trop célèbre Spécial Activities Division), mais plus spécialement (puisque nous sommes dans le «spécial » (qu’on prononce ainsi qu’on on veut, à l’Américaine ou à la Française) du dit redoutable Spécial Opérations Group (OG), très exactement le Groupe S 16, le tout – cela se devine même sans images, sous le commandement de l’imparable CIA.

Il a fallu convaincre, donc – et mordre presque le chef-qui-n’y-croyait-pas, ces hommes de pouvoir, vraiment!

Maintenant, c’est bon ( façon de parler). Tout est gentil. L’opération a pour nom « Neptune’s spear », se déroule à BILAL, près d’ABBOTTABAD, en territoire pakistanais, « Ah zut, au fait, Président, c’est un peu con mais il paraît qu’on a oublié de prévenir les Pakis. On fait quoi, pour le PM Paki ? Remarquez, Président, c’est pas que ça aie la moindre importance, mais juste ça va couiner, on vous prévient, Président. »

Sur ce sujet, il paraît, je l’ai entendu dire à Wespoint, Aristophane, mais si le Grec- enfin celui des nôtres planqué par ce nom de code-disait : « Avant d’envoyer tes marins sur la Seine ou d’entrer en scène, méfie-toi qu’ils aient l’usage de l’Ouzo et de L’Uzi, sinon ça use les Ouzbecks »…

-Mais on parle de Pakis !

– Ah merde je confonds toujours.

-Pas grave, c’est un peu tous pareil.

A 8h20, GMT, fuseau Washington le 29 avril, et c’est la nuit là-bas, après plusieurs réunions tendues (car un seul doute : «On ne sera jamais TOTALEMENT sûrs, avant d’être face de face à lui, Président ! » ), Barak Obama donne le vert.
Laurent Gaudé, à la fois grand et populaire écrivain, bonheur rarissime, raconte l’attaque à sa façon, s’aidant de témoignages volontairement plus ou moins mensongers. Plutôt, un ex-Navy Seal, tapi, en rupture de ban, trafiquant ou désespéré, ou pire encore, est au cœur d’un parcours à la poursuite de son propre sens : A quoi servent nos victoires, si nous en faisons de nouvelles défaites ?

A quoi serviraient nos souvenirs les plus gras si nous n’en faisions de maigres récits ?

C’est pourquoi ma route vers La Mura, FERRARE, le jardin, le creux du cœur, le Secret de Giorgio, ma route est parcourue comme par un pèlerin privé d’urgence, par un non-vengeur démaqué, mon chemin mon miroir, pour quoi ne ferait-on pas étape dans d’autres souvenirs que les siens, pour ramasser au passage ce que les Anciens, rejoignant leurs maîtresses blondes ou leurs mignons gras, nommaient ‘plaisir de l’escalier’ ?

De l’escalade ? De l’escapade ? De l’estrapade ? De l’estafilade ?

En 2012, avec sortie prévue en septembre (anniversaire !) mais anticipée finalement, cet ancien Navy Seal du commando publie « No Easy day », d’abord sous le pseudo Mark Owen (colossal humour, mais c’est un Navy), puis se désanonymant, au cours d’entretiens de promotion, son vrai nom est Matt Brissonette, ça fait un peu « frenchie », mais il n’y peut rien. Si on croit son récit ( mais on sait qu’on ne doit jamais tout croire  d’un récit de combat), les hommes ont tiré parfaitement de sang froid (comme aurait écrit Capote) sur OUSAMA BEN LADEN, qui ne portait pas d’arme. Un hiérarque, dirigeant de l’ United States Spécial Opérations Command, appellation en soi de nature à glacer le sang d’un étudiante italienne telle Erika, dément avec la plus extrême vigueur, ce n’est pas une exécution mais une légitime défense, expression usuelle qui signifie :

« C’est pas faux, Jojo, mais t’aurais pas voulu qu’on laisse ce total barjo se barrer?! »

Entre-temps, ont lieu des centaines de débats/entretiens/publications : thème, les US étaient-ils dans leur droit de monter une telle attaque, de toute façon, mort ou pas ? Les types du SOG dans la SAD sont écroulés de rire, leur « droit » » se nomme América. Berlusconi, encore vaillant pour l’éternité, a sobrement déclaré : « C’est un grand résultat dans la lutte contre le Mal ». De son côté, peu après, le vertigineux ( et un peu contraint) premier ministre pakistanais, Youssouf Raza Gilani ne lésine pas : « Grande Victoire ».
Modeste commentaire. Pour un meurtre à plusieurs et en direct. América.

Tout ça, il faut l’avouer, notre Erika s’en émeut, c’est un film à suspense, il lui faut retrouver son calme.

A part ça, le PM Pakistanais : Gilani, ça fait un peu rital, comme Brissonette sonne son frenchie, bizarre, bizarre. Européens ? Sont allés partout. Inguérissables. Avec ou sans masque ? En général, plutôt à visage découvert, et le compte courant à la ceinture.


Didier Jouault pour YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 35/99, Chapitre 11 – fin. violent et désopilant, faut voir, l’attaque ? A suivre le 20 octobre (l’attaque, on y reviendra, pas de panique)

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YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 34/99, Il fallait que ce fût très violent ou très désopilant -Chapitre 11 – second milieu (mais cette affaire louche ne manque pas de milieux).

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Aujourd’hui, dans sa Mantoue frétillant de chaleur et d’éclats, sans doute Erika pourrait-elle penser : on a le temps, mais il n’y aura sans doute plus de thermomètre qui n’ait fondu.
Pour l’heure (qui passe !), le père tente de conserver ses clients, disharmonieux mais puissants, pour qui naguère il construisit d’opulentes demeures impuissantes à justement trouver l’harmonie, mais triomphantes d’étalage luxueux. Car la bulle interne a brisé, à sa façon très gonflée, tous les rêves de futur simple, après avoir provoqué l’orgasme sale des bénéfices de stock-options. Des maisons pas comme celle-là, une véritable forteresse en plein désert, au Pakistan, pas très hospitalière, mais on verra tout ça courant octobre- si les délais sont tenus ( mais les délais d’un chantier, on redoute d’y penser au moins autant qu’à l’heure de sa vieillesse, quand tout lendemain est trop proche) ce sera chapitre 12.IMG_3358
Le printemps 2000, pour l’instant,  marque sa déplorable entrée maligne dans le millénaire qui se voulait malin. Le marché de l’art s’effondre, à cette époque l’or c’est plus discret et fusible. Il faut revendre les nombreux tableaux acquis grâce au cabinet d’architecte, au moins quatre fois moins cher que leur valeur, et bientôt pas du tout. A ce tarif, pas de tarif, mot d’ordre du galeriste, un peu comme « pas de blessés ». Si Vous le prenez ainsi, Giovanni, autant les garder, tous ces tableaux, de toute façon il y a tant de murs ici, et avec la maison en Toscane, ça va combler les blancs, les plans, et ma fille Erika, elle adore les couleurs.

Disputations entendues par Erika, et les tableaux invendables collectionnés par le père vont en conséquence rester dans la famille. Excellente base pour une activité à venir- encore inimaginée par Erika : la gérance d’une galerie d’art, rue Giorgio, à Mantoue. Plus téléphoné comme épisode, c’est dur, mais on n’a pas encore, ou presque pas, de iPhone, on anticipe avec ce qu’on peut. Déjà c’est plus Catherine Langeais sur la première chaîne télé, faut pas se plaindre.
L’autre évènement qui assied une partie profonde de son imaginaire et fracture des pans majeurs de son affectivité (encore une phrase à lire avec modération, va y avoir de la goualante parmi les juniors de l’agence) se produit très peu après la rentrée scolaire de 2001.
Moi, je me souviens (comme chacun, je suppose) des circonstances.

Je sortais d’une réunion délicate. C’est en commençant à m’asseoir dans la voiture que j’ai appris la nouvelle. En m’attendant- et il attendait avec la radio ou des mots croisés-le chauffeur avait pu suivre depuis la 407 anthracite l’ahurissante série d’informations : « Ils ont tiré des avions sur les tours à New York ».
A onze ans, Erika, New York ça paraissait trop loin, et même plus tard ce sera environ pareil pour l’Afghanistan ou l’Irak, les tornades du désert ou les tribus Pachtounes. Mais, on l’a compris, c’était une petite fille sensible, bien que précoce, et sans doute peut-on imaginer que la multiplication des images et des mots qui évoqueraient l’attaque dans tous les sens, y compris le non-sens, a contribué de façon cardinale à son intérêt déjà croissant pour «  Les States », qu’elle nommera US.
Etant une collégienne protégée de toute difficulté, dont les scolaires (son regret principal était que l’option Grec ancien, mal placée à l’emploi du temps, la contraignait à se nourrir d’un panini dégueulasse, franchement oui, à la place de la cantine avec ses amies), Erika méconnaissait dramatiquement les crises intimes ou le rétrécissements sociaux.

Vers 2008, le tsunami de pauvreté aux US l’avait quand même un peu atteint. Enrichi par sa mémoire, en plus du reste, il avait pris des précautions, ce coup-là, comme une adolescente qui souffle dans le latex. Emu, on plaignit les américains spoliés, ouh là là, les pauvres, c’est terrible, mais on put achever de payer – plus lentement avouons-le –les travaux de la piscine pour la maison de Toscane, c’est fou que tous ces trucs coûtent cher, malgré les heures au noir.
Ce que le monde banal acceptait de laisser arriver jusqu’à la maintenant séduisante Erika, il fallait que cela fût très violent ou très désopilant, les deux modes majeurs de l’inexpressif. Elle grandissait, plutôt très bien, partait à la plage sans Pauline, avec pas si grand chose sur elle, et plus tard sa belle-mère s’en plaindrait souvent, des tenues de plage, ou des petits dessous qui s’exposent, mais c’est l’époque, même le rabbin n’y peut rien, avec ces filles, surtout si le mari ne dit rien.

La présence récurrente du Cavalieri Berlusconi, dans le rôle comique d’intermittent du spectacle, distribué en Président du Conseil, accompagna cette enfance, cette adolescence, cette jeunesse même. L’élu (car il l’était) détenait déjà le record de longévité, un peu comme celles de la Génération Cinquante, en France, bercée par la voix du Général de l’école primaire au début de l’université, avec bombes de l‘OAS ou diverses barricades en prime, on voit le résultat, trente ans plus tard. Pas de quoi être fiers.
Au fond, cependant, ces bruits, ce n’étaient que des ambiances sonores ponctuelles, un peu comme dans une boite de nuit après le troisième verre : on n’écoute plus le boum boum, on s’attache à des gestes sérieux, on regarde les corps dilués dans leur rien essentiel, délivrés des mensonges, trouver avec qui achever la nuit ou l’ivresse, rien de plus, on se demande où va la nuit, cette nuit, et – si on s’emmerde – on sort fumer.

Rien que des Camel.

Sans filtre, sinon à quoi bon ?

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 Didier Jouault pour YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 34/99, Il fallait que ce fût très violent ou très désopilant -Chapitre 11 – second milieu (mais cette affaire louche ne manque pas de milieux/ A suivre , le 15 octobre ( ah comme le récit passe )

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YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 33/99, Chapitre 11 – premier milieu. Il fallait que ce fût très violent ou très désopilant…Doux et fort comme un miel des Pouilles.

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Le père d’Erika, un peu démâté par deux ou trois verres de Pouilly-Fuissé, avait dit :

« Comme si c’était pas déjà si compliqué, le narratif, fragile comme un cerf-volant de papier, gluant comme un escargot mal cuit dans son trop d’ail, tu parles, ça court tout seul, et tu le rattrapes quand tu peux, le narratif, qu’est-ce que tu crois ? »

S’en suivent dans le désordre des épisodes que la presse stupidement glosera : opérations longuement discutées vivement ratées de libération, enfant très maltraité, Giovanni BRUSCA condamné à perpétuité mais sur d’autres motifs car on n’a pu établir de liens, puis vient l’ordre de l’assassinat.

La déposition de Gaspare Spartuzza, plus tard, fournit ces informations de première main (troisième couteau, première main) qui bouleversent l’opinion publique. Erika retrouvera l’écho de ce meurtre, et de ce temps, aussi, dans un rayon de la maison de campagne, en Toscane, parmi beaucoup d’autres et, pardon, de bien meilleurs. KAOS II (à l’origine « Tu ridi ») raconte l’affaire, c’est l’un des deux sujets du film que Paolo et Vittorio présentent en septembre quatre-vingt dix huit à Venise. Ils ont fait beaucoup mieux depuis, de sorte qu’Erika change le DVD après quatorze minutes de visionnage, y a heureusement pas que ce truc à regarder.

Elle se retourne vers la terrasse, le soir est doux et fort comme un miel des Pouilles, un verre de blanc dans le coucher rouge serait bienvenu. Elle s’enveloppe d’une sorte de boubou rapporté d’Addis Abeba par sa mère, à l’occasion du congrès « Femmes noires, femmes libres, femmes d’avenir, l’excision témoignage d’un esclavage moderne ». Sa communication y avait été accueillie avec enthousiasme.
Le temps passe paisiblement, mais le père de famille, lui, s’inquiète, bien que les évènements annoncés redoutables –et donc redoutés de tous les braves gens –n’aient pas eu les retentissements cataclysmiques (ou presque) décrits aimablement pas de bavards chroniqueurs un peu hagards au rencart.

On est passé à l’Euro, et le monstre glapissant nommé ‘Bug de l’an 2000’ n’a même pas réussi à faire bugguer les ordinateurs IBM des carabiniers de Reggio di Calabra, c’est tout dire. En février 2000 on a bien ri, car Erika persévérait dans la précocité : « Savez-vous quand sera la prochaine année à nouveau à la fois bissextile et centenaire ? Non, eh bien moi j’ai cherché, ce sera le 29 février 2400 ».

En ces moments-là, personne n’ajoutait à ces chiffres une plainte convenue, du genre : « Si la planète existe encore ».
Aujourd’hui, dans sa plate Mantoue frétillant de chaleur et d’éclats, sans doute Erika pourrait-elle penser : on a le temps, mais il n’y aura sans doute plus de thermomètre qui n’ait fondu. ET part se rafraîchir

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Didider Jouault  pour  YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 33/99, Chapitre 11 – premier milieu. Il fallait que ce fût très violent ou très désopilant… « Doux et fort comme un miel des Pouilles »A suivre.Le 11 octobre, ça devrait aller. Sauf s’il pleut trop, sauf si on se ré-enferme en écoutant Bashung, si les terrasses sont vides.

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YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 32/99, Chapitre 11 – Il fallait que ce fût très violent ou très désopilant – début .

Chapitre 11

Il fallait que ce fût très violent ou très désopilant

Cette image a un attribut alt vide ; le nom du fichier est riviera-1.jpg

Lentement, j’ai progressé vers le cœur du voyage: FERRARA. Ici j’ai pris mon temps, lambiné, finassé, faignassé, encore, mais n’empêche, j’aimerais en savoir davantage, pour en finir avec le jugement des yeux, comme une question posée jadis à l’enfance, et toujours aiguë : là, au fond, un vide ou de la vie à venir?

Sur la terrasse matinale polluée par des musiciens errants et plutôt sales, j’ai apporté la tablette, connectée sur la wifi du bar. Je m’offre quinze minutes pour tenter de récupérer tout ce qui est lisible- et dicible ?- sur la belle hôtesse, ERIKA.

A partir d’écrans successifs, se bâtit un portrait, dont on sait bien qu’il peut être dessiné de pièces fausses pour une image menteuse, ou de pièces vraies pour un puzzle raté.Ainsi que toute narration.

En mémoire, j’ai ces photos trouvées, très tard, le soir, retour d’errances urbaines dans la plate cité aux sombres pavés ( je me mets à parler l’adjectif comme dans une Odyssée), j’avais ouvert l’un de ces tiroirs de fond, de bas, de bas-fond, une commode-déversoir : travail banal de narrateur spéculatif. S’y sont installés pour les temps et les temps, à l’usage d’insomniaques, tels que moi, lentement amoureux de l’aurore aux doigts de rose, plusieurs table-books, tous désuets, en très bon état, catalogues d’expositions.

J’avais feuilleté, plus loin qu’un touriste s’y autorise (ou s’y intéresse? ). D’une enveloppe, trois ou quatre photos surgissent du brouillard, épreuves pas si anciennes. Oubliées là? On peine à y croire. Mais sinon pourquoi ? De toute évidence, il s’agit d’un travail sur images, préparant peut-être une publication sur un réseau privé ? Un préparatif pressé de cadeau impressionné?

Plus tard, mais je l’ignorais encore, le » Narrateur Spéculatif » nommé par construction YDIT, publierait des photos de nus, prises dans la belle maison de l’ile, TAXOS. Provocation – le Narrateur nous y habitua dès le début de plus de 200  » posts » -, mais qui cette fois provoquera une forte gène assez inattendue parmi quelques lecteurs, et encore davantage lectrices.

On ne se croyait pas si mal VU.

A plusieurs détails en examinant les tirages issus de l’enveloppe un peu froissée mais propre, on se demande s’il s’agit bien de « notre » Erika, la même, celle de Ma Maison du Rabbi ? Une soeur, peut-être? Jumelle ou presque? L’évidence d’un travail sur le rapport sourire/regard/poitrine élude toute allusion graveleuse.

ERIKA ?

A sa naissance, tout début années quatre-vingt-dix, le monde s’est simplifié, les murs séparant l’Europe ont fini par se dissoudre dans l’incompétence ou l’insolence. Son père, architecte à la mode et professeur à l’Ecole Spéciale supérieure de la région, s’est fabriqué une belle réputation, même si les ratés – ou les grincheux- lui reprochent d’accepter un peu facilement les travaux provenant de richissimes commanditaires désirant une luxueuse et inutilement vide villa en Toscane.
Il ne s’agit pas de la mafia, mais de traders (qu’on n’appelle pas encore ainsi) ou de startupers enivrés par l’envol de la bulle Internet, avant l’explosion : ruissellement des stock-options et fusions/acquisitions menées à la cadence d’une campagne d’Italie ayant bien tourné, contrairement à celle de ce bon François, roi fat fait prisonnier à Pavie, et bien longtemps retenu loin du royaume venant de BeauPapa.
Ce qui va lui laisser peu de temps au fond, pour passer des jours heureux, seulement trente-cinq jours de sa vie entière, dans son fastueux château de Chambord, incroyable et ruineux domaine construit à la lumière de la salamandre et aux couleurs chiffrées de l’alchimie, qui ont été aussi le tricolore décor de notre culture.


Histoire d’Erika, chacune son tour.

Erika aime tout le monde, c’est plus tranquille, le retour sur investissement est garanti. Et puis, aimer, c’est plus propre que négliger, ça pollue moins les alentours. Elle aime les collègues de Papa qui parlent urbanisme, politique, placements, tableaux, et femmes – bien que sur ce sujet on commence à limiter les dégâts de la parole virile. Car Maman psychanalyste ayant largement contribué ensuite à l’anti-psychiatrie, consacre des jours et des nuits au combat féministe, davantage qu’à ses consultations, mais on s’en fiche : l’argent est facile. Ainsi alternent dans la grande maison moderne les groupes de messieurs-dames z’ artistes – ou commanditaires fortunés un peu graves- avec les réunions joyeuses de dames en lutte, en butte à la critique. Sur la table du salon, s’empilent les cadeaux ou les achats, des livres divers qu’Erika lira plus tard, surtout les quatrième de couverture, quand il ne s’agit pas de ces gros volumes d’art trop lourds pour une fillette.
Elle grandit ainsi dans ce qui assure (assurément)une forme de bonheur induite par l’absence de questions délicates, ou de réponses douloureuses, les deux.
Cependant, même à trois ans, dans ce milieu préservé abonné à ‘La República’, comme jusqu’à six ans, Erika perçoit l’écho des histoires, et subit avec bouleversement ces constats, faits de loin (les parents éteignent la télé) : ici on enlève et on tue les petits enfants.

Certes, cela se pratique aussi très malheureusement aux USA, dont elle sera l’une des visiteuses les plus aimantes par la suite, mais tout de même, ça fait choc. A six ans, puisqu’on en parle, la fillette observe son père offrir à Mamma l’un de ces livres qu’elle adorera lire plusieurs fois, le somptueux et court opus de l’encore jeune Alessandro Baricco, « Sete » relancé brusquement par le Médicis Etranger décerné pour Castelli di rabbia, son premier roman. Une récompense parisienne, Erika ignore ce que c’est, mais ses parents ont voyagé, bu des cafés-crème à la terrasse du Café de Flore, fêté un anniversaire chez Lipp, déambulé ensuite rue Sébastien Bottin (elle se nomma ainsi longtemps) ou rue Jacob, rue des Saint Pères rien que du beau monde. «Tu te rends compte, dit Papa, Baricco a fondé une école, la Scuola Holden, dont les cours ( il rit un peu, il est passé au Chablis et c’est son troisième), dont les cours servent à savoir comment déconstruire le narratif. Comme si c’était pas déjà si compliqué, le narratif, fragile comme un cerf-volant de papier, gluant comme un escargot mal cuit dans son trop d’ail, tu parles, ça court tout seul, et tu le rattrapes quand tu peux, le narratif, qu’est-ce que tu crois ? »

Erika est une petite fille sage – elle le restera sous toutes ses formes et dans toutes ses images – 

elle écoute et s’intéresse. Une véritable lectrice.Pas mal, les amis !


Didier Jouault pour YDIT-suit : Le Jardin de Giorgio Bassani, épisode 32/99, Chapitre 11Il fallait que ce fût très violent ou très désopilant – début. A suivre

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