M M dit Le Parrain, utilisait la métaphore de la chaleur « Tu n’as pas trop chaud ? » comme si c’était du jeune corps de ce garçon-là près de lui qu’ émanait une étonnante et excessive chaleur, qu’il fallait réguler, qu’il fallait régler, en dispersant la chaleur, en l’épuisant,

comme si c’était le gamin l’agresseur, et alors pas d’autre issue que d’ôter le pyjama, autrement dit d’évaporer la chaleur du désir venue d’ailleurs : le corps du garçon…
Sans doute, l’hypocrisie de pudeur feinte consistant à ne pas se déshabiller dans la lumière, à ne rien commencer avant d’être dans le lit, sans doute cette pseudo réserve était-elle une façon pour MM dit Le Parrain d’associer l’enfant, puis presqu’adolescent, en lui soutirant l’absence d’un « non », en originant sur son corps à lui les sensations (trop de chaud) et le geste (repousser l’étoffe) qui de l’état de victime
(on déteste ce mot tellement plein de mensonges et tellement plein de vérités) le poussait à l’état de complice.
L’étonnement, – et ce pourrait être une tête de chapitre de ce roman-images : l’étonnement, l’étonnement de n’avoir pas non pas refusé, mais pas eu envie de dire non, la perplexité (le mot est plus juste) vient de ce que aujourd’hui encore YDIT, Septante et plus étant de plus en plus venus, reste incapable de fixer la moindre image de zones désirantes de la personne, même incertaine image, même lacunaire, même couverte de pénombre et menue comme une esquisse, pâle comme une ombre un jour de pluie.
Mais le discours officiel, aussi, pour la nuit d’après trop chaud du dîner chez Ma.Ch. reste pour toujours que – si elle acceptât bien sans réserve d’ôter la chemise de nuit et d’accoler la fraîcheur de leurs peaux un peu ivres – Ydit ne connut pas le goût de son intimité … Discours officiel ? 
Si quelques gestes sont nets, en compagnie nde MM dit Le Parrain, extrêmement présents dans leur précision, leur hâte, leur expression, toutefois aucune représentation du visage et jusqu’à la forme portée de la silhouette, rien ne subsiste de ces moments-là : on n’y voit rien.
Dans l’histoire, alors qu’il était lycéen, vers 17 ans, sortant du sous-sol de ce bar où l’on jouait au poker en buvant des cafés sous le regard d’un serveur plus ou moins aguiché, quittant prématurément la partie et les copains pour une raison oubliée, YDIT avait aperçu soudain, traversant une rue, pénétrant dans un PMU, ce Marcel Malbée, dit M M, autrement toujours nommé Le Parrain.
Impression banale de vu et reperdu aussitôt. Depuis longtemps à cette époque-là, l’homme avait quitté la scène de la vie quotidienne. Avec les amis, on bavardait à la sortie du lycée sans jamais s’être dit que la rue Dupetit-Thouars était toute proche et qu’il aurait été possible de se rencontrer sans le vouloir, plus souvent, qu’on en avait été jusque-là épargnés, l’un et l’autre. Cette fois donc on avait reconnu le parrain, et aujourd’hui…
Aujourd’hui on se demande ce qui aurait été mieux ajusté, ayant aperçu Marcel Malbée, dit MM. Rejoindre Die Pate dans le PMU, Gitanes et Ricard, discuter du tiercé avec lui comme si de rien n’était ? Se rapprocher du bar en zinc et Formica inventés à l’époque, et lui demander de ses nouvelles ? S’il s’interroge toujours malicieusement sur l’excès de chaleur tiède sous les pyjamas clos des garçons jeunes?
S’il a changé leur âge en vieillissant ? L’attendre à la sortie, pour s’approcher, le regarder droit en face, le gifler, lui décrocher un direct puissant dans l’estomac ( ce qu’on ne sait pas faire) achever le geste d’un double coup de genou dans le bas-ventre, bien entendu, et pendant qu’il se plie sous de violents crochets à la mâchoire. Il se pisse dessus, il saigne du nez, c’est joli à voir. Très plaisant. Contraire à toutes les valeurs. Mais joli, rien à dire.
Puis s’asseoir sur lui en le tenant aux oreilles (on se souvient sans image qu’il était quasiment chauve) pour lui frapper la tête au sol, sa tête à lui à son tour blessée, en murmurant à son oreille (autre version : en criant), sur un rythme jazzie : « Tu n’as pas trop chaud mon parrain, tu ne veux pas enlever ton blouson ? Mon petit Parrain, mon petit Marcel, ton blou, ton blou blou, ton blouson !».
Trois ou quatre des consommateurs du PMU, sans doute de vieux compagnons de zinc, mais aussi quelques passants se précipitent pour séparer le pauvre plus que quinquagénaire (le temps passe, il a vieilli) et son jeune agresseur si brutal, encore un de ceux-là qui ne veulent pas respecter la règle et injurient l’âge. Deux types prennent YDIT par les épaules, tandis qu’une femme crie d’appeler la police, appeler la police -sinon le feuilleton n’est pas assez conforme-. Et le narrateur impénitent raconte, étrangement inaudible, la glissade vive de Ma.Ch. nue sous la chemise, le souvenir conté de cette fin de soirée, dans le trois pièces très rangé, moment incertain,
et le souvenir est vif de cet instant, peu de temps après, (la similitude avec la question de Marcel Malbée dit Le Parrain est soudain violente), quand Ydit avait questionné Ma.Ch. vers la fin de la soirée, quand elle avait proposé qu’il dormît chez elle désignant sa chambre)et Ydit d’une voix sentant le vin : « Tu n’as pas trop chaud ? 
Tu ne veux pas enlever ta chemise ? ».
L’homme Marcel Malbée, dit MM, dit le parrain gémit en se tenant (admettons que ce n’est pas facile, admettons qu’il a un peu mérité) d’une main les parties – bien connues de l’agresseur mais tout le monde encore l’ignore croit-il, et de l’autre la mâchoire. Le voici près du square du Temple, mais pas d’illusions : la mâchoire blessée, le corps meurtri, en dépit des résonances du lieu, le Temple, ce n’est pas Robespierre qui expie en Thermidor les fulgurances mais aussi les indécisions, les visions mais aussi les erreurs de la Révolution française. Non ce n’est que Marcel Malbée le minuscule, dit Le Parrain avec majuscules, cassé d’un peu partout, pourtant relevé comme s’il s’agissait d’une victime appelant la compassion. Le storyboard, trop vite esquissé, ne précise rien quant à ce que l’on réserve à YDIT en matière de sanction, ou à MM dit le parrain en matière de guérison (on a compris ceci qu’il est insaisissable, impardonnable, inguérissable).
« Ce que je me demande quand même, aurait ajouté Fred qui -à son habitude-aurait hésité entre le désir d’écouter et le plaisir d’interrompre- je m’interroge sur ce qu’aurait fait l’autre personnage de la pièce, Hanged James, lui, s’il avait reconnu quelques années plus tard, son propre M M dit Le Parrain, son Marcel Malbée à lui , sortant d’une boulangerie?
Jamais
Jamais
Jamais on n’apprendra pour quelles raisons, quelles déraisons, l’un s’est pendu dans le carré de la fenêtre, et l’autre non, qui rigolait si bien de tout.
Je me demande aussi, surtout quand tu te permets à présent d’évoquer de telles séquences de ton scénario intime, ou de tes fantasmes, la prétendue chasse aux parrains (mais tu as compris que les morts sont impunissables ?), je me demande ce que c’était que Le Parrain de Hanged James, s’il jouait aussi avec la pénombre, le chaleur du pyjama, et tout le reste à jamais indicible ? S’il opérait avec la précision insolente mais efficace d’un geste adulte imposé aux confusions corporelles d’un garçon même pas encore préservé de ses hontes ? La main, comment?.. La bouche, ici ? Des vrais baisers? Une forme de tendresse feinte ? Quoi de si différent ? »
YDIT répond ce qu’il répond à chaque interrogation du souvenir :
Il y a HANGED JAMES, ici, voilà tout : pendu.
Hanged James, gentiment présent, même pas tournoyant sur lui-même, et qui lorsque le mouvement de la vie lui permet de me faire face m’offre son sourire amical et goguenard, un peu tendre et lassé donc, comme s’il s’apprêtait à dire (quoi qu’il soit impossible de plus rien dire dans son état) à demander : « Alors quoi d’autre, mec ? Quoi de neuf ? Et quand est-ce que tu oses dire tout? Dire le vrai du fond ?».
Evidemment nul ne peut dire la suite, sauf que Ma.Ch dormit réellement nue dans le soir.
.Didier JOUAULT pour YDIT-BLOG, nouvelle saison, saison 4, Episode SOIXANTE-SIX MC Ch dort nue dans sa chemise de nuit PYJAMA 2/2, fin